Gardez le farotage hors de l’école !




Samedi dernier, pour honorer mes obligations de parent, je me suis rendu à l’école fréquentée par mes enfants. J'étais invité pour assister à la cérémonie de départ en vacances que les établissements de culture anglo-saxone appellent modestement «Graduation». Durant ce moment, les écoliers les plus méritants sont récompensés et, c’est aussi l’occasion pour les parents de se faire une idée des savoirs, savoir-faire et savoir-être acquis tout au long de l’année scolaire. Ainsi les écoliers, sous la conduite de leurs enseignants, se livrent à de nombreux exercices : danse, défilé de mode, simulation de journal parlé, chants, récitations, sketches... C’est un moment agréable pour les parents qui voient leur progéniture briller sur le podium construit pour la circonstance.

Durant ces exercices, il se trouve que de nombreux parents, sans doute dérangés et souhaitant avec rage et gourmandise se montrer surliquides, se livrent à une activité qui me donne, à y  penser, l’urticaire : le farotage. Le farotage est un néologisme dont l’origine serait la Côte d’Ivoire. C’est l’action de jeter, avec générosité, les billets de banque sur un individu, en général un artiste ou quelqu’un que l’on souhaite récompenser pour quelque service. Sociologiquement, le farotage trouverait son fondement plus loin que les DJs qui chantaient les louanges de certains cadors de la jet-set,  footballeurs pour l’essentiel. De façon historique, les griots, dans nos contrées et villages, se livrent lors des festivités, à des chants de louanges pour flatter les égos des personnes des personnes nanties qu’ils ciblent espérant une récompense pécuniaire. Qui ne souvient pas des images diffusées par la télévision nationale ou l'on voyait le griot Boukar Doumbo et flanqué de ses musiciens chanter "Paul Biya Camaruuuuunnn".

Mon malaise vient du fait que cette pratique vulgaire, avilissante et humiliante - pour récupérer l’argent qui vous est «jetté» vous devez plier l'échine pour le ramasser - trouve un nid au sein des établissements scolaires qui sont, jusqu'à preuve du contraire, des sanctuaires ou morale et éthique doivent être les seuls guides. Si l’on souhaite donner de l’argent dans le cadre de l’académie ou de l’école, le farotage n’est pas le mode souhaitable et souhaité. En « farotant » leurs enfants, qu’est-ce que ces parents souhaitent que ceux-ci retiennent? Les écoliers doivent-ils retenir que cette pratique est une norme admise par la société ? J’aurais aimé voir ces derniers si, au moment de percevoir leur salaire, leur patron jetait leur paie au sol en leur demandant de la ramasser. Par décence et par respect de l’académie et ce qu’elle représente, il serait plus élégant, de mettre cet argent dans une enveloppe et de le remettre aux enseignants pour les remercier pour le travail accompli ou à défaut, d’offrir des bourses aux élèves les plus méritants.

L’école est un lieu sacré ou nos enfants apprennent à socialiser et prennent les marques pour un cheminement qui les guidera tout au long de leur vie. C’est quelque chose que nous devons respecter. Et ça c’est du domaine du sacré. Et ce qui est sacré se respecte. Alors, de grâce, gardez le farotage hors de l’école.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Bouba Kaélé : De El Alamein à Mbalam

Les visages de la publicité au Cameroun

Enjeux des innovations technologiques dans la sécurisation routière au Cameroun